Portrait d'un homme qui débusque les fuites

Le chant de la fuite

Hugo Rodriguez, Technicien Mesure Hydraulique Réseau

Quand Hugo parle de son métier, une chose interpelle rapidement. Il répète qu’il est essentiel d’avoir de l’oreille… Ça a l’air un peu étrange… Mais en fait, pas tant que ça ! C’est grâce à leur oreille « musicale », et notamment à celle d’Hugo, que les Techniciens Mesure Hydraulique Réseau, ceux qui recherchent les fuites chez Veolia Eau d’Île-de-France, délégataire du Syndicat des Eaux d’Île-de-France (SEDIF), vont pouvoir les repérer sur le réseau d’eau, les entendre, en écoutant le bourdonnement continu des bruits souterrains.

 

 

Quand Hugo raconte son métier, ses yeux brillent, et il ne peut s’empêcher de sourire. Le sourire de quelqu’un qui voulait cacher un secret mais qui rêve de le révéler. Quelqu’un fier de dire que chercher des fuites sur le réseau du territoire du SEDIF, c’est comme un jeu de piste à grande échelle. 

Un jeu de piste aux enjeux considérables, que ce soit pour la qualité de vie des habitants ou la préservation de la ressource… 

 

 

Il est difficile de l’imaginer, mais lorsque l’eau commence à s’échapper d’une canalisation du réseau, elle peut ressortir n’importe où et faire de gros dégâts. Dénicher l’origine d’une fuite pour la réparer ensuite devient alors capital, une véritable course contre la montre pour Veolia Eau d’Île-de-France. Car cette perte d’eau peut coûter cher, causer d’importantes nuisances pour les riverains et pour l’environnement.

Il faut l’entendre pour le croire
Avec son camion, son casque de chantier, ses bottes et son regard concentré, on croiserait Hugo sans penser autre chose que « tiens, des travaux dans ma rue… ». Mais ce ne sont pas que des travaux…

 

Ce sont de véritables enquêtes à mener. Et charge à Hugo, et aux autres Techniciens Mesure Hydraulique Réseau, d’élucider les cas incompréhensibles de fuites d’eau. Et pour y parvenir, Hugo sonde à l’oreille — comme dans les sous-marins — au travers des épaisseurs des revêtements de chaussée, de terre, de matériaux divers et variés dont il connaît toutes les caractéristiques.

Pour entendre ce qui se passe « en dessous », Hugo a deux méthodes principales. La première consiste à scruter, de manière préventive, ce que des appareils enregistrent chaque nuit, vers 3 heures du matin.

 

Ces capteurs acoustiques, placés dans les 150 communes du territoire du SEDIF, dans des endroits stratégiques au niveau des canalisations, font partie d’un projet appelé « Res’Echo » mis en place par Veolia Eau d’Île-de-France. Ils transmettent leurs données au ServO, centre de pilotage du Service de l’eau, qui rassemble les informations utiles à la maîtrise des pertes en eau. Ces données sont ensuite traitées et transmises aux Techniciens Mesure Hydraulique Réseau. 

Ainsi, depuis son camion, sur son ordinateur, Hugo peut chercher à comprendre les bruits qui lui sont rapportés.

Cette écoute permanente du réseau permet souvent de repérer les fuites les plus petites avant que celles-ci ne fassent de dégâts. Et surtout, elle contribue à ce que le réseau de Veolia Eau d’Île-de-France soit très efficace, avec très peu de pertes sur celui-ci. En effet, fin 2019, Veolia Eau d’Île-de-France a atteint un rendement de réseau* de 90%, grâce aux importantes actions menées, comme les écoutes permanentes. Cette grande vigilance permet d’avoir une gestion responsable de l’eau et ainsi, de mieux veiller à la protection de la ressource.

 

 

Quant à la seconde méthode, il s’agit de se déplacer directement sur le terrain afin de pister la fuite dans le béton aveugle de la ville assourdissante. Et c’est rarement une mince affaire…

La recherche peut commencer, mais par où ?
Certains jours, c’est simple, la fuite est sous ses pieds. Mais d’autres fois — pas si rares –, elle se dérobe, insaisissable, et peut même donner l’impression de se déplacer… Hugo va alors déployer tout son talent. Grâce à ses connaissances du réseau et à son expérience, il invente mille et une stratégies pour trouver précisément où percer la chaussée.

 

 

Les dégâts d’une fuite peuvent se manifester à plusieurs centaines de mètres. De nombreux paramètres compliquent l’écoute et l’analyse : l’enchevêtrement des différents réseaux de gaz, d’électricité et de fibre optique, les bruits de moteurs qui parasitent, les distances, les différents types de canalisations. Une simple fuite peut devenir un casse-tête gigantesque.

Et puis, certaines canalisations ont plus de quarante ans, certains plans aussi, qu’il faut savoir décrypter… Heureusement, Hugo dispose d’outils technologiques performants et innovants (matériel de corrélation acoustique, gaz traceur, hydrophones, cartographie exhaustive du réseau, juxtaposée à une carte des environs…). Et il possède surtout deux qualités indispensables : une excellente connaissance du fonctionnement du réseau et une capacité à combiner créativité et méthode.

Hugo va donc analyser la situation pour élaborer une stratégie de recherche. D’abord parce qu’il faut faire au plus vite, ensuite parce qu’il est impensable de creuser sur toute une avenue pour trouver une fuite.

Il faut alors écouter et comprendre ce qu’on entend : un son aigu ou grave, continu ou haché, fort ou faible… Ces petites distinctions, sorte de « signature acoustique » de la fuite, de ce qu’il entend, vont lui fournir des informations précieuses sur la distance et la gravité de la fuite, lui faire comprendre « où chercher »…

 

 

Dans des bouches à clé, ces plaques de métal qui donnent accès aux robinets des canalisations, Hugo va placer deux capteurs acoustiques au plus proche de la fuite.

 

 

Les enregistrements faits sont envoyés sur l’ordinateur qui les compare. Si le son restitué par l’un des capteurs a du retard, la différence donne l’emplacement de la fuite. Si les deux sons sont différents, il peut s’agir de deux fuites, ou encore d’une fuite et du bruit du moteur d’un véhicule immobile…

D’une intervention à l’autre, le problème n’est jamais le même, et demande à chaque fois une approche singulière. C’est tout le charme du métier, aucune intervention ne ressemble à la précédente, c’est une nouveauté permanente. Et puis, au-delà des recherches techniques, il y a beaucoup d’humain dans le métier d’Hugo. Une fuite peut être source d’inquiétude chez les personnes impactées. Alors, Hugo doit rassurer, expliquer son métier, le travail de Veolia Eau d’Île-de-France, les enjeux, ce qu’il fait… Sans oublier les questions de sécurité à toujours prendre en compte, pour lui, mais aussi pour les riverains.

 

 

Débusquer les fuites dans un gigantesque réseau, anticiper des dégâts des eaux, utiliser son expérience, démêler une situation inextricable, chaque jour, trouver de nouvelles solutions, participer à la préservation de la ressource… cela représente des défis passionnants pour Hugo ! Si vous lui demandez s’il aime son métier, il vous répond d’ailleurs avec un regard qui en dit long. Et quand on pousse la conversation, il ne demande qu’à transmettre son expérience acquise sur le terrain à de nouvelles personnes prêtes à entendre le chant de la fuite.

 

 

*Un rendement de réseau permet de comparer les Services de l’eau du monde entier.


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